Procès Shafia: pas le temps pour les meurtres, selon la Défense

Procès Shafia: trop d'incertitudes, selon la Défense

KINGSTON, Ont. - Il subsiste tout simplement trop d'incertitudes pour déclarer Mohammad Shafia et son épouse coupables de quatre accusations de meurtre prémédité en lien avec la mort de leurs trois filles et de l'autre femme de l'accusé, a plaidé mardi son avocat.

La Couronne affirme que M. Shafia, âgé de 58 ans, son épouse Tooba Yahya, âgée de 42 ans, et leur fils Hamed, âgé de 21 ans, ont tué les trois adolescentes et la première épouse du patriarche. Les corps ont été découverts le 30 juin 2009 à l'intérieur d'une voiture submergée dans une écluse du canal Rideau, à Kingston en Ontario. La Couronne n'a toutefois pas présenté de preuves détaillant exactement la cause de leur mort.

La Couronne a avancé que les quatre femmes étaient décédées avant que le voiture ne se retrouve dans le canal, mais dans sa plaidoirie finale, l'avocat de Mohammad Shafia a averti les jurés qu'ils ne peuvent se fier à cette théorie.

«Vous ne savez pas où, vous ne savez pas comment, vous ne savez pas quand cela s'est produit, vous ne savez pas qui serait impliqué», a lancé Me Peter Kemp.

«La Couronne a le fardeau d'établir la culpabilité hors de tout doute raisonnable. Avec toutes ces inconnues, il n'y a que la spéculation qui peut fournir des réponses. Et la spéculation, mesdames et messieurs, ne constitue pas une preuve hors de tout doute raisonnable. Les accusations contre Mohammad Shafia n'ont pas été prouvées et il doit être acquitté.»

L'avocat de Tooba Yahya, David Crowe, a également présenté sa plaidoirie finale mardi. Il a lui aussi dénoncé la qualité de la preuve de la Couronne et estimé que sa cliente doit être acquittée.

Dans sa plaidoirie finale, Me Kemp a présenté un possible scénario de meurtre, qu'il a rapidement discrédité, expliquant au jury que l'accusé n'aurait jamais eu le temps de le concrétiser.

Autant Me Crowe que Me Kemp ont affirmé que le motif évoqué par la Couronne est peu convaincant.

Au cours du procès, des témoins ont raconté que la relation entre M. Shafia et ses adolescentes était orageuse, mais Me Crowe a indiqué au jury que l'accusé avait pardonné sa fille Zainab, âgée de 19 ans, pour ses «écarts de conduite» — incluant le fait de fréquenter un jeune homme, de se marier et rapidement divorcer — et qu'il n'était pas courant que son autre fille, Sahar, âgée de 17 ans, avait un petit copain.

Son conflit avec la cadette Geeti, âgée de 13 ans, était surtout liée à son assiduité à l'école, selon Me Crowe. Me Kemp a ajouté que si Mohammad Shafia voulait que Rona Amir Mohammad, âgée de 52 ans, ne fasse plus partie de sa vie, il ne lui aurait pas permis de le suivre lorsque la famille a immigré au Canada en 2007.

Me Crowe est revenu sur le témoignage d'un expert sur la question des crimes d'honneur.

«Le concept de crime d'honneur ne s'applique pas aux évènements qui vous sont présentés», a dit l'avocat. «Il devrait être complètement ignoré pendant vos délibérations.»

Les jurés devraient commencer à délibérer vendredi. Le juge a averti les membres du jury que l'avocat du troisième accusé, Hamed, s'adressera à eux mercredi, suivi de la Couronne, dont la plaidoirie devrait se poursuivre jeudi.

Le juge Robert Maranger donnera ses instructions finales aux jurés jeudi et vendredi.

Revenant sur les propos enregistrés à l'insu de Mohammad Shafia dans lesquels il qualifiait ses filles de «putes» et affirmait que le diable pouvait aller déféquer sur leurs tombes, Me Crowe a convenu que ses expressions sont «troublantes».

La défense a toutefois avancé que l'allusion au sujet du diable est courante en Afghanistan et que les enregistrements montrent M. Shafia en colère après avoir découvert des photos de Sahar en bikini et qu'elle avait un petit ami.

Me Crowe a estimé que les enregistrements ne prouvent rien.

«En aucun moment dans l'enregistrement, nous n'entendons 'Nous les avons noyé'», a-t-il rappelé. «En aucun moment dans l'enregistrement, nous n'entendons «'Nous avons regagné notre honneur en les noyant'.»

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